Voitures de plus en plus grosses : quels dangers ?
Élargissement des voitures : un risque imminent
C’est un constat indéniable : les voitures neuves ne cessent de gagner en largeur. Portée principalement par l’engouement autour des SUV, cette tendance pose toutefois de nombreux problèmes. Consommation de carburant, usage des ressources, empiètement sur la voie publique ou encore mise en danger des autres usagers : découvrez tous les risques liés à l’élargissement des véhicules.
1 cm de largeur de plus tous les 2 ans
Selon une étude publiée le 22 janvier dernier par l’ONG Transport & Environment (T&E), la largeur des voitures neuves semble progressivement augmenter en Europe : elle était de 180,3 cm au premier semestre 2023, contre 177,8 cm en 2018. À en croire les données collectées par l’ONG ICCT (International Council on Clean Transportation), cette tendance au « toujours plus gros » s’est confirmée au cours des deux dernières décennies (1).
Et selon T&E, tout laisse à croire que les véhicules vont continuer à gagner en largeur. Il faut dire que les voitures neuves commercialisées au sein de l’Union européenne peuvent mesurer jusqu’à 255 cm de large, soit la même limite que pour les camions et les autobus. Un élément principal explique cette croissance frénétique : l’augmentation du nombre de SUV vendus. Ces véhicules représentaient 44 % des ventes en France en 2022, contre seulement 12 % en 2010 (1). Or, « les SUV sont en moyenne plus hauts, plus longs (+ 26 cm), plus larges (+10 cm), mais surtout plus lourds (+205 kg) » que les véhicules standard, comme le note WWF (2).
Une consommation grandissante de ressources
Cette « SUVisation », comme la nomme T&E, pose tout d’abord la question de la consommation des ressources et de l’énergie. Parallèlement à l’élargissement des véhicules, ces derniers ont logiquement vu leur poids augmenter : + 140 kg en moyenne entre 2010-2012 et 2020-2022. Or, les voitures ont besoin de moteurs plus puissants et énergivores à mesure que leur poids progresse. Preuve de cette tendance de fond, le Peugeot e-3008 commercialisé en 2024 est 5,4 cm plus large que son équivalent thermique de 2021 (1). Les pouvoirs publics en ont d’ailleurs bien conscience : ce n’est pas sans raison si un malus au poids a été instauré en 2022.
Plus grand, plus large et plus lourd, un SUV consomme en toute logique davantage de carburant : + 20 % en moyenne pour un modèle thermique par rapport à une voiture de taille « classique » (3). Une situation qui augmente proportionnellement les émissions de CO2. Quant aux SUV électriques, ils ne sont pas non plus exempts de tout reproche. En raison de leurs dimensions, ils nécessitent plus de métaux et de ressources pour leur batterie qu’une citadine électrique. Selon WWF, une Twingo ZE demanderait en effet 5 fois moins de lithium, de cobalt et de nickel qu’une Tesla Model X par exemple (4). À en croire T&E, il serait d’ailleurs possible de réduire la demande de métaux de 20 % en réduisant la taille des batteries d’ici 2050 (1).
Un risque pour la sécurité routière
Au-delà de l’impact environnemental, l’élargissement des voitures pourrait représenter un risque accru pour les usagers de la route. Si les SUV protègent mieux leurs passagers, ils sont en revanche plus dangereux pour les autres. Pour preuve, un piéton ou un cycliste aurait 30 % de chances de plus de décéder s’il est percuté par un SUV, principalement en raison de son capot surélevé. Quant aux occupants d’une voiture « classique », le risque de blessures graves est 20 % plus important s’ils ont un accident impliquant un SUV (5).
L’association T&E soulève aussi la question du stationnement. En effet, plus les véhicules grandissent, plus ils prennent de la place pour se garer. Or, cela porte préjudice aux autres usagers de la route : les piétons, les cyclistes, les transports en commun (tramway, bus, etc.) et mêmes les autres voitures. Les conséquences sont nombreuses. Moins de place sur les trottoirs, des pistes cyclables moins larges, des véhicules qui empiètent sur la voie publique et même une diminution de la visibilité, la vision de la route étant obstruée par les SUV.
Des pistes se dessinent
Face à ces différentes menaces, les gouvernements européens se doivent d’apporter des réponses adéquates. Le durcissement du malus au poids est un premier pas : depuis 2024, il se déclenche à partir de 1 600 kg (contre 1 800 kg auparavant) et il concernera les véhicules hybrides rechargeables à partir de 2025. Toutefois, il pourrait être pertinent d’appliquer également cette taxe aux SUV électriques afin d’inciter les constructeurs à proposer des véhicules moins volumineux et gourmands en ressources.
Mais les municipalités peuvent aussi avoir leur mot à dire pour enrayer l’élargissement des véhicules et la prolifération des SUV. Le référendum mené à Paris début février en est le parfait exemple : il a mené au triplement du tarif de stationnement pour les véhicules les plus lourds. Un exemple qui va également être suivi à Lyon et à Grenoble. De quoi inciter les automobilistes à acheter des véhicules moins imposants ? Rien n’est moins sûr…
Sources :
(1) Le SUV, une voiture qui prend trop de place – Transport & Environment – 2024
(2) Le trop plein de SUV dans la publicité – WWF – 2021
(3) As their sales continue to rise, SUVs’ global CO2 emissions are nearing 1 billion tonnes – IEA – 2023
(4) Métaux critiques : l’impasse des SUV – WWF – 2023
(5) Des voitures plus lourdes, plus hautes et plus puissantes pour une sécurité routière à deux vitesses ? – VIAS – 2023